Histoires
courtes du jour le plus long
Par Antoine Bourguilleau
L'été dernier, à l'occasion de l'anniversaire du
débarquement de juin 1944, les papiers relatant les faits dans
les moindres détails n'ont pas manqué. Mais à côté
des commémorations et des grands articles de fond, il nous a semblé
intéressant de revenir sur certains points peu ou mal connus, les
à-côtés de la grande histoire qui forment les infimes
parties du puzzle.
La palme de la planification
Le débarquement allait-il se passer correctement ? Certains
en doutaient fortement, y compris Eisenhower qui, la veille du débarquement,
rédigeait une note où il endossait l'entière
responsabilité de la défaite. Comme l'avait dit Joffre
trente ans auparavant : "Je ne sais pas qui a gagné
la bataille de la Marne
mais je sais qui l'aurait perdue !"
Il faut dire que Eisenhower est un général de bureau,
il a peu commandé sur le terrain.
C'est l'officier d'état-major dans toute sa splendeur : En
1942, alors qu'il planifie l'opération Torch, le débarquement
en Afrique du Nord, il expose à Murphy, officier de renseignements
en contact avec les Français de la région, sa vision
de l'opération :
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Diorama de André
Jacobs
"Quiet before the
storm - Caen 44"
Une colonne de char britanique stoppe pour une tasse de thé
tandis que des fantassins avancent vers le front.
© Battlefront Miniatures
Limited 2002
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"Aux questions qu'Eisenhower et ses officiers me posaient, je
réalisai qu'ils voyaient l'Afrique du Nord comme une sorte de jungle,
avec des cabanes en torchis. Je leur assurai que cela ressemblait plutôt
à la Californie
Eisenhower me demanda prudemment si des vêtements
d'hiver étaient nécessaires, et je répondis par l'affirmative."
D'aucuns prétendent qu'il ne faut pas chercher d'autre explication
au fait que les Américains n'avaient pas le moins du monde envisagé
les " petits " problèmes qu'ils allaient rencontrer dans
le bocage normand. " Ah bon ? y'a des haies et des talus en Normandie
? C'est pas comme en Afrique du Nord ? "

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La palme Wargame & Figurines
Non, ce n'est pas une invention des scénaristes du Jour
le plus long ni un placement produit de chez Hasbro : le soir du
5 juin 1944, les Allemands sont effectivement en train de faire
une petite partie de wargame entre potes. Sur le front du mur de
l'Atlantique, on s'ennuie ferme en attendant l'invention de Diplomacy.
Aussi, à Rennes, le général Dollmann a convié
les officiers supérieurs de la 7e armée allemande
à une soirée à thème, sur un scénario
particulièrement imaginatif : " Débarquement
allié en Normandie, précédé par des
parachutages. " Mais où va-t-il chercher tout ça
?
Affiche du film de Ken Annakin,
Andrew Marton, Bernhard Wicki (1962) Avec
John Wayne, Eddie Albert, Paul Anka
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La palme de la prévision
Le général allemand Wilhelm Falley, commandant la
91e aéroportée, stationnée à Ste-Mère-Eglise,
le 5 juin 1944, vers 20 heures, annonce à son officier d'ordonnance
qu'il quitte ( ?) pour aller jouer au wargame à Rennes :
" De toute façon, que voulez-vous qu'il arrive cette
nuit avec ce temps de chiotte ? "
Para US par Sgt Perry
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La palme de l'humour
Vers 3 heures du matin, le 6 juin, la directrice de la maternité
de Ranville est réveillée par du boucan. Elle se lève
et tombe nez à nez avec un lieutenant de la 6e division para britannique,
accompagné des neuf hommes qu'il est parvenu à rassembler
après que son stick se fut éparpillé.
Le lieutenant, dans un français correct, déclare avec emphase
: "Madame, nous sommes l'armée britannique de libération."
Jetant un regard inquiet par-dessus l'épaule du lieutenant, la
directrice réplique : " Rassurez-moi, vous n'êtes
pas tout seul ? "

Pegasus Bridge
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La palme du shoot them up
Le sergent Summers a inventé Counterstrike le 6 juin au
matin. Arrivant vers le village de Mézières, il avise
une série de maisons servant de logement aux soldats allemands,
point connu sous le nom de WXYZ dans les rapports des services de
renseignements. Ses petits camarades parachutistes étant
encore sonnés par l'atterrissage, Summers décide de
se payer du Teuton tout seul : Il rentre dans la première
maison en faisant voler la porte à coup de rangers : il tue
quatre Allemands, rentre dans trois ou quatre autres maisons et
en couche encore trente autres. Pour finir, il déboule, un
peu groggy, dans le mess, où quinze soldats prennent leur
petit déjeuner, n'ayant inexplicablement entendu aucun coup
de feu. Il les flingue tous. En cinq minutes, il a tué cinquante
personnes. Le sergent Summers, c'était pas le mauvais gars,
mais fallait pas trop le chercher !
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Image du jeu Medal Of Honor de EA games
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